Hyper vigilance quand tu nous tiens.

« Même si ton adversaire te semble une souris, surveille-le comme s’il était un lion. » Luigi Manfredi

 

Installés en famille devant un bon film, il est 20h30. L’agencement de leur salon fait que Victoria, Alex et Emma donnent dos à la terrasse. Ils ne voient donc pas leurs chats, ni les araignées, ni toute autre bestiole arriver.

Je suis sûre qu’en lisant cette phrase, vous vous dites « elle est tendue ou parano ? ».

Et bien voyez-vous, le terme exact serait plutôt « hyper-vigilante » due à ma phobie des insectes. Je dois avouer que je ne me doutais pas, avant d’arriver à la Réunion, que j’avais autant peur des bébêtes. J’ai tout de même grandi au Maroc où nous avions quelques spécimens de cafards et autres bestioles toutes aussi glamour. Je me considère donc comme une fille de la campagne. On arrive à se raconter de belles histoires quand même.

J’ai mis de côté mes 25 années passées à Paris, dans un contexte certes pollué, mais par certains aspects aseptisé. 25 années à rêver d’une vie au milieu de nulle part, dans la nature. Tu parles d’un bobard !

A la première « babouk » (araignée en créole) rencontrée, j’ai failli faire une attaque et là toute proximité avec une plante verte était synonyme d’araignée. A noter que cela n’a aucun rapport mais la phobie ne s’explique pas et les raccourcis pris pour la justifier sont souvent dénués de toute logique.

Revenons donc à cette soirée. Je suis assise sur le canapé à côté de ma fille et de mon mari. Je suis plutôt détendue. Nous sommes à l’intérieur, à priori pas de babouk, ni de blattes en vue. Et puis je ne suis pas seule, je peux respirer.

Mais du coin de l’œil, je vois notre chat, le chasseur, rentrer en douce dans la maison. Je jurerais qu’il cherche à se planquer. Une sonnette d’alarme (oui, oui) se met en route dans ma tête et là je hurle : « il a une souriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiis dans la gueule !!! »

Branle-bas de combat, le chat s’enfuit et monte les escaliers vers notre chambre, poursuivi par Alex et Emma. Il se cache sous notre lit.

Je suis toujours en bas, totalement paniquée ne sachant pas quoi faire. Je les entends parler au chat, lui demander de sortir. A ma question « qu’est-ce que je fais ? » Mon mari me répond « ouvre la porte d’entrée ! »

Et là je lève les yeux et vois le chat courir vers moi, la bête dans la gueule. Tu parles que je vais ouvrir la porte, je vais me barrer, oui.  Parce que là, je n’ai pas juste peur. J’ai l’impression que je porte en moi une terreur incontrôlable qui vient de milliers de générations de femmes avant moi. Ce n’est pas MA peur, ce n’est pas possible. Une telle panique ne m’appartient pas. Je ne voudrais pas me déresponsabiliser que l’on soit clair, mais enfin….c’est surprenant !

Je file en courant, prête à monter sur une table. Je ne me maîtrise plus. Heureusement le chat a filé en direction de la terrasse. La porte-fenêtre était restée ouverte. J’imagine que c’est mon mari qui a fermé derrière lui. Je ne me souviens de rien. Nous avons compris plus tard qu’il s’agissait non pas d’une souris mais d’un rat ou d’un mulot.

Quelques mois plus tard, le chasseur est mort et c’est son frère le chétif qui a décidé, ce soir, de me ramener une souris. C’est peut-être ce qui a inspiré ce texte.

Cette fois je suis seule avec Emma, sur le canapé (toujours ce fameux canapé), occupée à lui mettre des gouttes pour son otite. Soudain, j’entends des petits cris stridents ! Je bondis, je sais ! Dans ma tête, tout va très vite, je me dis « je le savais qu’il finirait lui aussi par nous ramener un truc. »

Le chat tourne dans la véranda, il chasse. Les cris continuent. C’est confirmé, il ne joue pas avec son jouet à clochette. Emma le suit, même pas peur (pas comme sa mère), et me dit posément: « c’est une souris maman». Je la vois, elle est minuscule, elle file se cacher. Emma, de son côté, essaie d’empêcher le chat de lui faire du mal. C’est mignon, non ?

Mais moi je veux qu’il me débarrasse de cette bestiole. Je ferme les portes situées entre la véranda et le salon. Je suis stressée mais pas paniquée. J’envoie un message à mon mari.

Je reste calme, envoie ma fille se coucher et reste enfermée dans cette chaleur étouffante. La souris ne peut pas rentrer, ni le chat, ni personne d’ailleurs.

Le constat est simple : j’ai peur mais je ne panique pas. J’ai sécurisé le périmètre et j’attends les secours….. enfin…. mon mari.  C’est un bon début non ?

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