L’obsession de Victoria (partie 3)

« Il faut avant de donner la vie, l’aimer et la faire aimer ».

Henry BORDEAUX

Avril 2009, les billets pour New York sont réservés. A quelques semaines du Jour J, l’organisation du mariage est sous contrôle. Victoria et Alexandre profitent des premiers rayons du soleil du printemps. Rappelons qu’ils ont décidé de prendre une pause  » traitements » pour leur projet bébé. Ils vivent leur histoire sereinement l’un avec l’autre et l’un pour l’autre.

Les journées s’enchainent tranquillement. Je m’ennuierai presque dis donc.

Il faut dire que ces quatre dernières années ont été bien chargées. Dépression, divorce, changement de boulot, nouveau petit copain, deux déménagements, traitements hormonaux, fractures de l’épaule droite et de la main gauche etc … tout ceci avait rythmé ma vie. Et encore je ne rentre pas dans les détails parce que là, rien qu’en écrivant je suis fatiguée.

En allant déjeuner avec une copine, celle-ci me demandait où j’en étais dans mes projets de bébé. Oui, parce que vous avez toujours une bonne âme pour vous ramener à votre réalité. Et puis à 30 ans passés quel autre sujet de conversation ? C’est à croire que les filles n’ont rien d’autres à penser.

Mais à cette période, ma préoccupation était notre mariage. Mais bien sûr ! Vous m’avez cru en lisant cette phrase n’est-ce pas ?

Vous dire qu’à ce moment-là, je ne pensais pas du tout à l’idée d’avoir un bébé, serait un énorme mensonge. Vous noterez mon honnêteté redoutable.

J’étais vraiment en pause… sur le principe, et je savais que « pas d’hormones pas de bébé ». J’avais pourtant choisi de prendre un petit traitement de confort dirons-nous afin d’avoir des cycles réguliers et de pouvoir « maîtriser » mon planning. Une vraie working girl ! On ne se refait pas.

Mesdames, messieurs, une obsession reste une obsession. Ne pas penser à cette envie de bébé quand vous êtes une femme? Nous sommes conditionnées par notre horloge biologique certes mais aussi par notre chère société. Nos  cycles, enfin, nous le rappellent tous les mois.

« N’y pense pas » me disait-on tous les jours. Non mais franchement ! Je cogite en permanence, mon cerveau est tout le temps en ébullition !  Autant me demander d’arrêter de respirer ! Cette phrase est insupportable pour les femmes qui vivent cette situation, sachez-le. Personne ne commande ses pensées, ou alors on est maître Yogi. Personnellement je ne sais pas « ne pas penser » alors « ne pas Y penser »….

Ce n’est pas Descartes qui dit « Je pense donc je suis? » Il était malin lui déjà l’époque. Encore que, peut être devrions nous dire « Je suis donc je pense » non?  Allez, je m’égare comme d’habitude. Normal, je pense en même temps que j’écris.(hihihi)

Donc, sur les conseils de cette fameuse copine (celle du déjeuner), je prends rendez-vous chez son « médecin, spécialisée dans les problèmes de fertilité, de grande de folie », « le meilleur de la place de Paris ». Encore un autre! Parce que tout le monde connaît le meilleur médecin de Paris dans ces moments-là. Et je vous jure, j’en ai vu des phénomènes. Qui fut le pire ? Celui qui me reçut à 8h45 et me libéra à 8h55 avec une ordonnance pour une batterie d’examens. Pas d’auscultation, pas de questions et une facture de 150 euros ?

Ou celle qui m’accueillit avec un kilo de bijoux à chaque main et me diagnostiqua (sans examens) un problème d’anovulation ?

Vous n’avez pas du tout l’impression en sortant du cabinet de ce genre de médecin d’être une machine à sous. Non, non, vraiment, je vous assure.

Je prends donc rendez-vous chez cette merveille en me disant qu’au moins, avec lui, on préparera le terrain pour des traitements plus poussés dès septembre. J’étais sûre d’une chose, en effet, avec ce spécialiste on allait passer à l’étape supérieure. J’allais sur mes 34 ans, on essayait avec Alex depuis plus de deux ans. J’avais un passif je vous le rappelle. L’obsession de Victoria (partie 1)

Les cachets puis les piqûres n’ayant rien  donné, on allait enfin, passer à l’’insémination puis la FIV (Fécondation in vitro). Oui, c’est ce qu’on appelle le protocole de la PMA (procréation médicale assistée). J’avais de nombreuses copines qui étaient passées par là et j’avais lu des tonnes d’articles sur le sujet. J’étais bien renseignée, à défaut d’être enceinte, je connaissais toutes les techniques.

Me  voilà donc dans le cabinet de ce ponte de la fertilité, le Docteur LY, seule. Inutile de traîner Alex voire même de lui dire.

Enfin, un docteur digne de ce nom, il commença par le début : m’interrogea sur ma vie et mon parcours. Puis, il me prescrit une batterie d’examens à faire lors de mon prochain cycle pour mettre en place un protocole à la rentrée. Je vous rappelle que nous étions en avril. Je partis toute légère en me disant: « voilà une bonne chose de faite, je suis tranquille jusqu’en septembre ». Pour le reste je n’étais franchement pas à une piqure prés J donc je pouvais commencer les examens.

Malheureusement, blocage ou problème avec le traitement en cours, mes règles n’arrivaient pas. J’envoyais donc un mail au Dr LY en lui demandant quoi faire. Top ce médecin, non ? Moderne, je pouvais lui envoyer des mails et tout. J’adore.

Sa réponse fut laconique : « faites un test de grossesse ».

NOOON, il ne va pas s’y mettre celui-là aussi. Franchement, ils me saoulent tous. Ils ne se rendent pas compte ! Ça me donne un espoir que je ne veux pas avoir ! Je ne supporte plus cette déception !

Mais bien sûr que je vais le faire ce p… de test. Maintenant qu’il m’a mis la puce à l’oreille, le poison dans le cœur, que puis-je faire d’autre sinon obtempérer ?  Pourquoi suis-je allée le voir, j’étais tranquille ça pouvait attendre !

Voilà l’état d’esprit dans lequel je suis lorsque je fais ce test, seule le soir en rentrant après le boulot veille d’un jour férié. Mon homme n’était pas là et même pas au courant de ce qui se tramait.

Et là…..C’est une blague…le test est positif ??!!!? Je n’en crois pas mes yeux ! C’est impossible !

J’en suis tellement scotchée que lorsque mon amoureux m’appelle depuis le restaurant où il passe la soirée avec son frère je lui dis : « je ne vais pas pouvoir aller courir avec toi demain. »

« Ah bon pourquoi ?» Je suis sûre qu’il a pensé « elle va me la faire à l’envers, elle essaie encore d’éviter de faire du sport ».

Je réponds très simplement « à mon avis je ne vais pas courir pendant les 9 prochains mois » et là ….Silence fracassant. J’ai cru qu’il était tombé dans les pommes. On n’était pas loin remarque, il s’est assis par terre choqué.

Je dois vous avouer que j’ai refait trois tests, que j’ai insulté (dans ma tête) la pharmacienne qui m’a vendu un test pourri. Je ne voulais pas y croire. J’ai fait ma prise de sang et puis lorsque tout fut confirmé je paniquais. Ben, tiens faudrait pas être heureuse on sait jamais que ça fasse mal. Les nausées commencèrent très vite et toute la journée. Ma mère me disait que c’était bon signe. Du coup ça ne me dérangeait pas. J’aurais pu avoir des boutons partout pas de problème. Si seulement j’arrivais juste à apprécier.

Je retournais voir le médecin avec Alex cette fois-ci.Il nous félicita et me demandais pourquoi je pleurais. Ah oui parce que je pleurais. Je ne vous l’ai pas encore dit ça, mais je pleure tout le temps. Certains crient, s’énervent, frappent, rient,  moi je pleure. C’est ma manière à moi d’exprimer mes émotions, surtout ma peur et surtout à cette époque.

En sanglotant je lui expliquais à quel point j’étais terrorisée qu’il ne tienne pas et peut être qu’il fallait annuler New York ce serait plus prudent.

Il rigolait, oui oui, il se f.. de moi ce gentil monsieur et m’expliquait que « au lieu de vomir à Paris, j’irais vomir à New York ».  En effet vu sous cet angle ça paraissait assez simple.

Quant à mes angoisses : « Madame, la nature est bien faite, s’il ne tient pas c’est qu’il n’est pas viable et du coup il vaut mieux qu’il s’en aille ». C’était implacable, tellement évident que vous ne pouvez pas vous battre. C’est un peu ça le secret : pourquoi se battre quand tu n’as pas la main?

En écrivant ce texte je me rends compte que la Victoria d’aujourd’hui dit souvent (dans ma vie, dans mon travail) : « il est des combats qu’il ne faut pas mener. Quand on n’a pas la main c’est une perte de temps et d’énergie ». Peut-être que cette philosophie me vient de cet instant où le  Dr LY m’a rappelé que je n’avais pas le pouvoir de faire tenir ce bébé ou pas dans mon ventre.

A bientôt, si vous le voulez bien:)

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