La « rentrée » de maman

« Je n’aime pas le travail, nul ne l’aime; mais j’aime ce qui est dans le travail l’occasion de se découvrir soi-même, j’entends notre propre réalité, ce que nous sommes à nos yeux, et non pas en façade. »

Joseph CONRAD

Les jours passent. Victoria s’apaise, continue ses rendez-vous réguliers avec la psychologue de la PMI. Elle commence à sortir de chez elle sans peur. Mais au bout de 6 mois, il est temps pour elle de reprendre le chemin du travail.

Retourner au bureau ? Tourner le dos à ma fille et la confier à une ou des inconnues ? Mais quelle horreur !  Je vais être obligée d’abandonner mon enfant.

Je dois vous avouer  que dans ma vie j’ai eu deux grandes phases. Une dans laquelle il était hors de question que je me marie, que j’ai des enfants. Je voulais avoir une carrière et être une femme libre et indépendante. Et une plus sage et conventionnelle, me marier à 25 ans, avoir des enfants (3 voire 4) et m’occuper de ma famille. Dans ce second scénario, il était hors de question que je confie mes enfants à une inconnue.

Et me voilà donc à bientôt 35 ans, avec une carrière certes, un deuxième mari et un premier bébé que je vais être obligée de laisser à quelqu’un pour aller bosser.

On est loin de l’un ou l’autre des scenarii. Un truc a dû m’échapper et j’ai raté un wagon…

Qui a dit que l’on pouvait tout planifier ? Sur ce point-là, D. ou quoi que ce  soit au-dessus de nous m’avait bien mis au parfum. Rien ne se décide, rien ne se maîtrise. En tout cas cela ne fait pas partie de mon karma de pouvoir planifier ma vie.

D’ailleurs, j’ai toujours été impressionnée par ce type de fille qui t’annonce qu’elle a décidé de faire un bébé cette année. « Ce sera parfait car il arrivera pile au moment où le grand rentrera à l’école ». Deux mois après, c’est dans les tuyaux, enfin dans l’utérus et c’est parti mon kiki ! Cet exemple est une illustration mais généralement ça marche aussi pour la recherche de nounou, de crèche ou autre type de garde. Ne vous méprenez pas, il n’y a pour le coup ni jalousie, ni aigreur.

Sauf bien sûr si ce genre de fille, par maladresse ou sciemment, venait me narguer avec un « je suis enceinte, c’est arrivé trop vite, je ne suis pas prête ».  Toujours pas de jalousie et d’aigreur mais un sentiment de surprise outrée m’envahissait à chaque fois devant tant de bêtise ou de méchanceté selon l’humeur dans laquelle je réceptionnais cette information.

Aujourd’hui j’avais mon bébé, ma petite fille, mon joyau dans les bras. J’avais le droit à mon bonheur et j’étais dans une situation que je n’avais pas prévue. Un deuxième mari, un enfant et une carrière, en bref un scenario 3.

Je dois prendre les choses en mains. Première étape, trouver un mode de garde pour ma fille, deuxième étape reprendre le travail sans me faire absorber.

La galère du mode de garde commence. Avant la naissance je n’étais déjà pas fan de l’option crèche. Pas de flexibilité dans les horaires et les enfants n’étant pas acceptés s’ils étaient malades, faisait de cette solution la moins adaptée à ma carrière. Vous savez la fameuse, celle qui me  permettait d’avoir le statut de femme libre et forte.

Après l’accouchement cette solution n’était plus du toute envisageable, certes parce qu’il n’y avait pas de place (les embouteillages parisiens même dans les crèches) mais surtout parce que je n’allais pas laisser ma petite princesse avec d’autres enfants au milieu des microbes. Une seule puéricultrice pour 6 ou 10 mouflets, j’en étais malade d’angoisse. Hors de question que je sorte mon bébé à 8h du matin dans le froid glacial pour la déposer au milieu d’autres mioches. Vous l’avez compris, Emma n’est pas allée à la crèche.

Commence alors la recherche infernale d’une solution de garde. Encore plusieurs possibilités et nous nous orientons alors vers la garde partagée. Ah la garde partagée !!!!!!! Entre les nounous dingos et les familles hystériques j’ai cru vraiment que nous ne trouverions jamais.

Et pourtant ça commençait bien. J’avais trouvé une super famille dans le même immeuble. On ne pouvait pas imaginer meilleure contexte. Rapidement l’autre maman et moi-même avons fait passer quelques entretiens et trouvé la nounou qui nous convenait. Oui je suis angoissée, pourtant bizarrement je n’ai jamais cherché la nourrice idéale. Après tout l’idéal était que je reste avec ma fille, je voulais donc une personne avec qui je pourrais parler, qui me « laisserait » être une mère sans me faire la morale. Nous avions en effet rencontré plusieurs personnes dont une qui m’avait mise mal à l’aise. Elle avait de l’expérience certes mais nous avions à peine débuté l’entretien que j’avais l’impression qu’elle vérifiait que nous nous occupions bien de nos filles.

Bonne nouvelle, nous étions sur la même longueur d’ondes avec ma voisine. Et nous avons trouvé. Tout était sous contrôle, sur les rails. Nous avions la nounou, la famille, j’étais fin prête pour retourner au travail. Franchement c’était parfait. Et bien c’était sans compter sur mon karma « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? »

3 semaines avant la reprise, ma nouvelle copine/voisine m’appelait pour m’annoncer qu’ils avaient obtenu une place en crèche. Et là, normalement, c’est le drame ! Euh, en fait non ! J’avais une nounou et gagné une copine. J’allais trouver une solution forcément. Mon côté philosophe reprenait le dessus. Il n’y a pas de problème, uniquement des solutions. Mon « problème » était surtout de laisser ma fille. Là, il s’agissait simplement d’une difficulté à surmonter.

Et en effet nous avons trouvé des solutions et d’autres familles. Je ne vais donc pas m’attarder sur le sujet car il va finir par devenir banal. Et puis vous l’avez compris…. « pourquoi faire simple…. ? »….Si je devais rentrer dans les détails nous n’en finirions pas. Mais si vous avez des questions n’hésitez pas, je suis expérimentée sur le sujet. Un peu comme le mois à l’hôpital avec Emma, ce fut un apprentissage J

J’allais reprendre le boulot avec quelques compétences supplémentaires. Qui a dit que le congé maternité ne sert à rien pour l’entreprise J

Me voilà de retour dans l’entreprise. Quelle douleur de laisser mon bébé. Et oui il s’agit bien d’une douleur physique. Je n’avais pas eu le temps de me lasser de cette vie de maman à la maison. Je n’avais déjà pas su la garder au chaud jusqu’au bout de ma grossesse et maintenant je ne pouvais pas rester auprès d’elle. Au moment où elle commençait à s’éveiller au monde, il fallait que je l’abandonne.

Qu’est-ce que c’est compliqué d’être maman ! Finalement heureusement qu’elle était née prématurément. Je la confiais à la nounou à presque 5 mois, si j’avais dû la laisser à moins de 3  mois (durée du congé maternité en France) j’aurais certainement perdue la tête.

Ah ! Vous croyiez que c’était déjà le cas ? Eh non je suis pleine de ressources. Enfin je suis allée chercher de l’aide un peu partout pour garder toute ma tête. Je ne vous ai pas encore tout raconté, vous verrez J

Je n’étais pas très heureuse de retourner sur mon lieu de travail, cela expliquait peut-être aussi ma difficulté à me remettre en activité. Poursuivre mon activité professionnelle ne fut donc pas si simple.

Après 6 mois d’absence, je trouve à peine ma place de maman et vis des moments de grandes remises en question. Mon cœur me dit de rester auprès de ma fille, ma raison me souffle qu’il est temps pour moi de reprendre une activité et retourner à la réalité.

C’est le chaos dans ma tête. Une fois n’est pas coutume n’est-ce pas ?

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